Comprendre l'harmonie d'une musique, ça ne veut pas dire arriver à reconnaître
le nom des accords joués dans un morceau, mais plutôt
arriver à comprendre et reconnaître des sensations, des couleurs crées par
des accords ou des enchaînements d'accords, autrement dit des cadences.
Dans cette page, nous allons illustrer les cadences les plus fréquemment utilisées avec des
extraits musicaux d'horizons divers : rock, chanson française, techno, pop,
chansons traditionnelles. Les cadences courantes en jazz sont présentées à la page
Les cadences courantes en jazz.
Vous arriverez à terme à reconnaître ces cadences à l'oreille,
et vous pourrez même utiliser celles que vous préférez dans vos compositions.
Voici la structure de cette page.
La cadence parfaite est l'enchaînement du degré V vers le degré I d'une gamme. Elle est très résolutive, c'est même LA cadence résolutive par excellence, et elle est très utilisée. Ici, on l'étudie d'abord dans une tonalité majeure, c'est à dire avec un degré I qui est majeur. Si vous ne savez pas ce qu'est un degré, je vous suggère d'aller faire un tour à la page Les degrés en musique.
Remarquez qu'on ne joue pas directement le degré V puis le I, mais on commence par le degré I : cela aide notre
oreille à percevoir la référence, la tonalité (majeure) dans laquelle on se trouve.
Analysons cette cadence pas à pas :
Le degré I est stable, résolutif. Le degré V est instable : il a envie d'aller vers le degré I. Lorsqu'on enchaîne les degrés V puis I, la cadence s'appelle cadence parfaite. On peut aussi choisir de rester en suspens sur le degré V, et on appellera cette cadence "demi-cadence".
On peut jouer cette cadence de plusieurs manières, et on peut aussi jouer le degré V avec une septième mineure (soit un accord 7) pour accentuer la tension qu'apporte cet accord.
Voici maintenant des morceaux où on trouve cette cadence.
La cadence plagale est l'enchaînement du degré IV vers le degré I. Elle est beaucoup moins résolutive, principalement parce que le degré amène une sensation d'instabilité beaucoup moins forte que le degré V.
Dans l'exemple qui suit, vous pouvez sélectionner avec votre souris les 3 blocs "I IV I" : l'outil Soundslice mettra automatiquement en boucle ce passage, ce qui vous permettra d'écouter la cadence plagale en boucle.
Cadences plagales et parfaites sont omniprésentes dans tous les styles de musique. Voici différents morçeaux qui contiennent des mélanges de ces cadences.
Faites attention. Ces cadences sont courantes et dites "simples" mais ça n'est pas pour autant qu'elles sont faciles à reconnaitre à l'oreille ! Par exemple, je trouve que la cadence plagale n'est pas évidente à reconnaitre, car elle n'a pas une couleur si marquée. Elle peut sonner un peu "fade".
La cadence parfaite peut aussi être jouée dans une tonalité mineure. Le degré I est mineur cette fois-ci, ce qui confère à cette cadence parfaite mineure une saveur un peu plus facile à reconnaître.
Voici quelques morceaux où on trouve cette cadence. Utilisez la fonction "boucle" de Soundslice (en sélectionnant la partie à mettre en boucle) pour écouter la cadence en boucle.
Tout comme la cadence plagale en majeur, cette cadence est très courante. La voici.
Maintenant, la voici mélangée à des cadences parfaites, tout ça dans une tonalité mineure.
Maintenant qu'on a vu comment sonnaient les cadences parfaites et plagales en majeur et en
mineur, il est important de comprendre une chose essentielle qui vous sera très utile dans votre apprentissage.
Pour bien intégrer ces cadences, il faut être à la fois capable de les comprendre et de les ressentir.
Viser uniquement leur compréhension risque de faire de vous un mathématicien de la musique, mais viser uniquement
le ressenti fera de vous un musicien qui ne maîtrise pas ce qu'il joue. Si vous travaillez ces deux composantes,
intellectuelle et émotionelle, vous deviendrez avec le temps un musicien qui maitrise ce qu'il fait.
Pour travailler votre compréhension des cadences, passez du temps à comprendre d'où viennent ces degrés I, IV et V
(par exemple à la page
Les degrés en musique).
Pour travailler votre ressenti des cadences, rejouez les accords des morceaux vus précédemment, seuls, ou
avec les audios. Écoutez plusieurs fois un seul morceau en essayant de percevoir la sensation qu'apportent les accords de
l'accompagnement. Parfois c'est flagrant, parfois c'est plus subtil.
Après avoir vu différentes cadences importantes et courantes, voici un enchaînement d'accord très souvent utilisé dans une tonalité mineure. Elle sonne un peu comme un cliché en musique flamenca, mais on ne le réduira pas à ce style ici, car cet enchaînement d'accords est utilisé de partout. On l'appelle parfois aussi la descente "Hit The Road Jack".
Et voici d'autres morceaux où on trouve cette cadence.
Les "4 accords magiques" est une expression qui fait référence à un enchaînement de 4 accords qui sont utilisés abondamment dans de très nombreuses chansons. En 2011 est sortie cette vidéo du groupe "The Axis of Awesome" qui enchaîne plein de chansons connues (des Etat-Unis) qui contiennent exactement les mêmes accords, les fameux "4 accords magiques".
Les degrés I V VI IV correspondent aux fameux "accords magiques". Il s'agit simplement d'un enchaînement d'accords très courant, même s'il en exite de très nombreux autres. Les voici sous forme de partition interactive.
La raison pour laquelle cet enchaînement est tant utilisé est que leur agencement se prête bien à une répétition incessante. On ne s'en lasse (presque) pas. Voici quelques chansons basées sur cet enchaînement d'accords.
Oui, vous avez bien lu : les 4 accords magiques ont aussi une version en tonalité mineur. La voici dans la tonalité de La mineur.
Et, pour illustrer ça, des morceaux qui contiennent cet enchaînement d'accords.
Vous vous êtes certainement dit, au vue de cette version "mineure" des 4 accords magiques, que C G Am F ressemble vraiment beaucoup à Am F C G. Et comme toujours (ou presque) vous avez raison ! Il s'agit de la même boucle d'accords mais prise soit à partir de C, soit à partir de Am.
Je vous passe l'explication détaillée, qui se trouve à la page
Qu'est-ce que la tonalité ?, mais allez y faire un tour si vous souhaitez comprendre
le pourquoi du comment.
Pour conclure cette section, voici un morceau dont le couplet est sur la tourne majeure, et le refrain
sur la tourne relative mineure. Une "tourne" signifie "un enchaînement d'accords".
Une pratique assez courante qu'on trouve dans tous les styles de musique est d'utiliser des
dominantes secondaires. Une dominante secondaire c'est "une dominante
qui précède un accord qui n'est pas le degré I". Et une dominante c'est un degré V.
Dit comme ça ça sonne compliqué, alors je vais l'écrire de façon plus
simple.
Dans un enchaînement d'accords, un accord peut toujours être précédé d'un accord qui se trouve une quinte plus grave
et qui est de qualité "7". Par exemple, dans l'exemple suivant, A7 est une dominante secondaire,
la dominante de Dm.
Dans l'exemple ci-dessus, l'accord de A7 a été rajouté avant le Dm. C'est le degré V de Dm (sa dominante) : c'est un accords qui amène une tension, et qui a envie de résoudre vers Dm.
Cette notion de dominante secondaire est assez subtile est nécessite de bien comprendre ce que sont Les degrés en musique et si possible d'avoir essayé de Retrouver les degrés d'oreille. Si c'est une notion assez floue pour vous, je vous suggère de prendre le temps d'aller lire ces pages.
Sans le A7, on passe directement de Am à Dm. Avec le A7, on rajoute une tension, cette fameuse dominante secondaire, qui résoud
parfaitement vers le Dm. Et par la suite, on trouve le E, qui résoud parfaitement vers Am puisque E (ou E7) est la dominante de Am.
Vous voulez voir un exemple ? Mais avec grand plaisir ! Allons piocher dans les antiquités classiques de la chanson française.
Entendez-vous la tension lorsque l'accord de dominante secondaire est joué ? Un accord de dominante secondaire est noté "V de ..." ou "V/...". Si c'est la dominante du II, on notera "V de II" ou "V/II". Maintenant, un autre exemple, un peu plus récent.
Dans ce dernier exemple, le G7 est le "V du V", c'est à dire la dominante secondaire du V.
Maintenant, c'est à vous de deviner quels sont les cadences jouées dans les chansons ci-dessous. Accrochez-vous, et rapellez-vous que c'est un exercice difficile lorsqu'on n'est pas habitué, alors soyez indulgeant avec vous.